Pour un baroudeur, avide de challenge, dur d’imaginer un séjour au Japon sans gravir son prestigieux sommet: le Mont Fuji, culminant à 3776 mètres d’altitude. C’est avec mes amis, baptisés « Anikis » au cours du voyage, que j’ai entrepris cette aventure.
De nombreux guides touristiques vous feront vite comprendre que le Mont Fuji est certes mythique et impressionnant mais sans réelles difficultés. Ils le décrivent comme étant une autoroute où les gens s’entassent, et ils citent parmi ce public des jeunes enfants ou encore des personnes âgées. Bref, pas de quoi s’enjailler à première vue…Leur discours est peut-être valable en haute saison mais à la fin du mois d’Avril, les choses semblent être différentes. En effet, les guides touristiques changent totalement de discours et citent la randonnée comme étant extrêmement dangereuse voire interdite. Bon aller on se le tente quand même !
Le matériel nécessaire à l’ascension
Au départ, nous voulions porter de simples équipements pour faire face au verglas et partir avec des chaines anti-chutes de ce genre :
Sauf que la plupart des vendeurs, sur base de leur expérience, déconseillent fortement d’envisager l’ascension du Mont Fuji avec un tel système: « c’est trop light, il faut du plus lourd ».
Bon d’accord, on passe sur le modèle supérieur avec des crampons d’alpinisme. J’ai opté pour ceux de chez Décathlon à 70€ la paire (de la marque Simond). Ils s’emboitent facilement sur des bottines munies de semelles rigides.
Pour le reste du matos, je vous avoue qu’on ne s’est pas trop pris la tête. On a juste prévu le minimum nécessaire pour une randonnée classique type ardennaise en plein hiver: petit sac à dos, un pantalon de randonnée, des thermiques, une veste, un buff, des gants (avec des chaufferettes pour les mains), un masque / lunette de soleil, un baume à lèvre, une frontale (au cas où..), etc…
La préparation de l’ascension
Vu les conditions météos annoncées et le petit stress permanent des écrits des guides touristiques, nous sommes partis sur l’idée de gravir le mont Fuji de bon matin (plutôt que de nuit) pour observer le levée du soleil. Au niveau de l’itinéraire, nous optons pour le sentier Yoshida, connu comme étant le plus facile d’accès jusqu’au sommet ainsi que le plus emprunté.
Au départ de Tokyo, nous nous sommes rendus en métro jusqu’à la station de Kawaguchiko près de l’endroit où nous avons logé (Fujiyoshida youth Hostel). C’est au cours du trajet qu’on a aperçu pour la première fois LE mythique Mont. Sur le coup, nous avons été envahis par une émotion démesurée! Le stress montait déjà à la veille de l’ascension. Le Mont Fuji est tellement impressionnant qu’on se demandait comment on allait atteindre le sommet. Ce dernier était d’ailleurs recouvert d’une neige abondante. Nous nous sommes vraiment sentis sous-armés pour aborder l’ascension sereinement.
D’ailleurs, je dois dire que les esprits se sont un peu échauffés à partir de cet instant. En effet, mes deux compatriotes doutaient de la réussite de l’expédition. Nous espérions que la météo joue en notre faveur le jour J. Je ne voulais pas laisser passer une telle occasion et me sentais dans l’obligation de saisir cette unique opportunité d’atteindre le sommet du mythique Mont Fuji. Il fallait les convaincre à tout prix.
On peut dire que la séance photo effectuée en soirée, la veille de notre probable ascension nous a quelque peu motivés à gravir la montagne. La motivation était à nouveau de la partie! Ces photos ont été prises au spot suivant : La pagode de chureito. Cet endroit est réputé et convoité par de nombreux photographes qui y prennent de magnifiques photos des points de vue vers le Mont Fuji. Si vous vous y rendez pendant la période printanière, vous aurez le privilège d’admirer de nombreux cerisiers japonais en fleurs.
Il est 19h00, nous sommes de retour à notre logement. Notre hôte ne se montre pas rassurante en nous déconseillant fortement de faire l’ascension du Mont Fuji. Apparemment, celle-ci n’est pas conventionnelle à cette période de l’année. Elle serait peut-être même interdite en Avril et autorisée uniquement en été. Après quelques recherches, il serait obligatoire de remettre un écrit aux autorités locales pour les informer de notre volonté de gravir le sommet. Dans ce formulaire, nous devions décrire le matériel emporté, la couleur de nos vestes et d’autres informations utiles. Sans cet écrit, les autorités ne peuvent pas venir nous secourir en cas de besoin. C’est donc un impératif à ne pas oublier. Ce formulaire est disponible aux centre d’informations de Kawaguchi-ko ou de Fuji-Yoshida mais nous avons demandé à notre hôte de nous le faire parvenir via les sites internet locaux.
Finalement c’est de bon matin que nous nous sommes levés. Notre hôte nous avait commandé un taxi la veille et direction Fuji Subary Line 5th station.
Dans le matériel emporté, nous avions prévu le pire, et ainsi laissé au pied du mont notre matériel de couchage (tente, sac de couchage etc…) au cas où l’ascension nous prendrait trop temps et qu’il faille y passer la nuit. Mais il était inimaginable d’emporter ce matériel imposant et lourd pendant notre marche. C’est pourquoi, nous l’avons caché dans les bois.
L’ascension du Mont Fuji
Nous étions comme seuls au monde. Une sensation que je n’oublierai jamais !
Au départ, le sentier semblait totalement déneigé et très facilement praticable. Confiants, nous accumulions les mètres un à un.
Un peu plus loin, nous avons pu apercevoir les premières pentes enneigées. Nous comprenions aussitôt l’intérêt de nos crampons. Sans eux, il nous aurait été impossible de poursuivre notre escapade.
Au fur et à mesure de notre avancée, il ne nous était plus possible de visualiser clairement une trace. Nous optons donc pour marcher à travers tout. Il faut dire que les dangers sont très minimes d’une telle pratique sur un volcan, étant donné qu’il n’y a pas vraiment de risque de tomber sur une crevasse (contrairement aux glaciers). Les refuges étaient presque totalement ensevelis sous la neige mais heureusement on pouvait discerner la toiture ressortant du sol. C’était nos points de repères pour nous permettre l’avancée sans vraiment se soucier de se perdre et donc rester proche de la trace originale.
A proximité du sommet, nous apercevons un homme armé jusqu’au cou de son matériel d’alpinisme. On avait clairement l’air de branquignoles à côté. Cet homme était russe et semblait avoir l’habitude de gravir des monts. Un peu plus loin, très proche du sommet cette fois, nous avons rencontré un petit groupe de Japonais. Eux aussi étaient surchargés de matos. Nous nous sommes sentis chanceux de cette météo relativement clémente.
L’atteinte du sommet était un réel bonheur. Une grande sensation de satisfaction personnelle. Un mythique mont gravit dans des conditions qui pourraient en décourager plus d’un.
Nous avons mis 2h30 pour avaler les 1500 mètres de dénivelé positif prévus au programme. Voici la trace GPS :
Du point de vue technique, nous nous attendions clairement à plus compliqué, notamment par l’inclinaison des pentes. Finalement l’altitude fût clairement l’ennemi le plus dur à abattre surtout pour mes deux compatriotes moins entraînés que moi. Il faut dire qu’encore le matin, on se levait à une altitude proche du niveau de la mer, et 4h plus tard on se téléporte à 3670 mètres d’altitude. Ce mal d’altitude (et le grand froid) ne nous a par ailleurs pas empêchés de réaliser notre mythique photo en « Naked Men » ! (que je m’abstiendrais d’afficher dans cet article 😀 ).
Ci-dessous la trace GPX téléchargeable pour quelques euros, une fois la commande passée. Merci beaucoup pour le soutien à notre blog. 🙂
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Pour la descente, nous avons pris le même itinéraire que pour la montée. Ce fût une réelle partie de plaisir pour autant qu’on aime les descentes. Nous étions au départ très prudents. On faisait attention à nos pieds, car la forte pente pouvait à tout moment nous faire dévaler la montagne d’une traite. Mais une fois que la confiance est acquise, nous avons compris qu’il était aisé de descendre « sur le cul » tout en contrôlant la prise de crampons sur le sol. C’était assez drôle de se défier dans ce genre de course en dévalant la montagne, sans se poser la question d’où se trouvait le sentier.
Arrivés en bas, on comprit qu’il serait très difficile d’avoir le bus du retour malgré l’intensité que nous y avons mis. Mais nous n’avons reculé devant rien. Nous nous sommes mis à courir.. mais malheureusement de peu, nous le manquions. J’étais pourtant certain que le chausseur nous avait vu! Les Japonais sont gentils mais ils aiment la ponctualité et mettent un point d’honneur sur les horaires…
A cet endroit même, nous nous surprenions par contre de croiser bons nombre de touriste japonais. Nous essayions tant bien que mal de gratter les cars des compagnies de voyageurs de nous prendre sur le retour, mais impossible, aucun ne nous acceptait.
Dans l’attente de trouver une solution, les japonais nous lançaient des regards interloqués. Ils semblaient juger notre allure et notre équipement. Comprenant que nous venions de gravir le Mont Fuji, ils semblaient nous féliciter par leurs gestes et paroles que nous ne comprenions pas. Mais une chose est sure; ils étaient épatés.
Après un bon moment passé à mater notre tente, se demandant où on allait la planter, nous trouvions finalement une solution de secours. Une camionnette transportait des passagers on ne sait trop où… Et il semblait y rester de la place. Nous avons sauté sur l’occasion. Ce qui nous permit, à notre plus grand bonheur, d’arriver proche de notre village de départ! Quelle coincidence.
Prochaine étape Kamikochi : la fête de la montagne !
Récapitulatif et recommandations
- Période : fin Avril (que je rappelle non recommandé). A cette période, les refuges sont tous fermés et inaccessibles (ensevelis sous la neige). Ne comptez pas sur un ravitaillement possible ou une pause au “chaud”.
- Niveau : moyen (3/5)
- Accompagnement : l’ascension est possible sans guide, moyennant un bon niveau sportif et être à l’aise sur terrain montagneux. A cette période, il y aura sans doute peu de guides qui accepteront de vous accompagner.
- Point de départ : Fuji Subaru Line 5th station (accessible en taxi ou par bus mais horaire contraignant)
- Voie d’accès : voie Yoshida (voie “normale”). La trace est relativement aisée à suivre. C’est intuitif (voir gpx à télécharger dans l’article)
- Altitude départ : 2300 mètres
- Altitude arrivée : 3776 mètres
- Dénivelé positif : 1476 mètres
- Distance : +/- 10 km
- Durée : 2h30 – 3h00 pour de bons sportifs (pour l’aller uniquement). Compter 5h00 pour un sportif moyen (niveau minimum que je recommande, surtout à cette période de l’année). D’autres sources estiment à plus de 5 heures d’ascension (en été). Ne négligez pas ces estimations si vous n’êtes pas habituer à ce genre de pratique sportive. Pour la descente, nous avons mis 1h30. Mais comptez 3h pour le sportif moyen.
- Astuce : Évitez les pauses trop longues sur ce genre d’épreuve. Les arrêts répétées vous feront prendre froid. Il vaut mieux avancer lentement et en continu.
- Budget : pas de prix d’accès
- Matériel :
- pour la période, prévoir des vêtements de randonnée chauds ! Les températures descendent rapidement dans les négatifs. Il faisait -10°C en haut, et le vent accentue la sensation de froid (je vous conseille toujours d’emporter avec vous des chaufferettes).
- Surtout, prévoyez des crampons ! Sinon vous n’irez pas bien loin.
- Les bâtons sont un gros plus. Je n’en avais pas prévu et j’avoue l’avoir regretté.
- Si vous n’êtes pas à l’aise avec les fortes pentes, le piolet pourra sans doute vous aider aussi.
- Je recommande vivement les guêtres. Ca vous évitera d’une part de trouer votre pantalon avec les crampons et d’autre part d’empêcher la neige de rentrer dans vos chaussures, et à termes les mouiller (ce qui va vous faire prendre froid).
- Autre indispensable, lunette de soleil. Si même c’est l’hiver et qu’il y a pas grand soleil, la neige peut vite vous rendre “aveugle”.
- Prévoir suffisamment de nourriture et d’eau (pas de ravitaillement possible sur le parcours).
- Point administratif : remplir le formulaire d’accès est obligatoire. Sans cela, il est fort probable que vous ne puissiez pas compter sur des secours en cas de problèmes. Ce formulaire est disponible aux centres d’information de Kawaguchi-ko ou Fuji-Yoshida, il est à remettre à la police.
Et n’oublie pas de shopper notre itinéraire pour te sentir plus confortable sur cette ascension. Enjoy !
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Merci pour cet article très intéressant.
Peux tu me dire s’il y avait encore de la neige à la 5ème station à cette période de l’année?
L’idée étant de monter à la 5ème en bus pour redescendre à pied au Sengen shrine (fin avril également)
Merci par avance
Fred